En 1912, le marchand d’art Wilhem Uhde, premier acheteur de Picasso,
s’installe à Senlis et engage une domestique, Séraphine. Invité chez des
notables, il y découvre une toile peinte sur bois, et apprend, stupéfait, que
l’auteur en est Séraphine. Une relation inattendue s’instaure alors
entre cette artiste autodidacte et ce mécène d’avant-garde, qui la tirera
de l’anonymat.
Séraphine est une femme libre, humble sans soumission et futée. Elle peint
sans cesse et sans retenue, comme si sa vie en dépendait. L’art lui est
plus essentiel que le pain qu’elle gagne durement. Convaincue que le Ciel
lui a soufflé sa vocation, animée d’une ferveur sacrée, elle parcourt les
bois à la recherche des pigments qui coloreront ses compositions flamboyantes
de fleurs et de feuillages.
Martin Provost déploie dans ce biopic un art du portrait aussi délicat et
contenu que Séraphine se montre fébrile et prolifique. Pour l’incarner,
il a choisi Yolande Moreau. L’actrice habite admirablement l’âme
troublée de l’artiste, ses élans mystiques comme ses éclairs de
cocasserie. La vitalité créatrice de Séraphine, avant que son destin ne
bascule, irradie de bout en bout ce film bleuté, épuré et ardent.
Anne-Cécile Antoni